Ergotisme : histoire de l’intoxication, religion, art et société.
- Lise Tran
- 1 août
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Dorina Ghirardi, Jean Andris (22/02/25)
Epidémie inédite, survenue autour de l’an mil dans un contexte désastreux avec guerres, disettes, invasions.
Appelé mal des ardents, ergotisme, feu de saint Antoine, elle se présente sous 2 formes :
La gangreneuse : démangeaisons, fourmillements devenant sensation de chaleur intolérable ; ensuite, perte de sensibilité et vasoconstriction des extrémités qui noircissent s’assèchent ; les doigts tombent (amputations spontanées).
La convulsive : spasmes violents, diarrhées, vomissements, maux de tête, hallucinations, manies.
Causes : intoxication alimentaire par une mycotoxine produite par un champignon parasite du seigle (claviceps purpurea). A l’état de repos en hiver, le champignon devient sclérote, qui deviendra stroma en été. Les spores sont entraînées par le vent et se déposent sur les épis. Elles sont dispersées par la pluie et les insectes.
Au Moyen-Age, la population est au faîte dans ses croyances aux reliques et intercessions des saints. C’est donc vers ceux-ci que se tournent les ardents. Parmi les intercesseurs, il y a la Vierge, mais aussi des saints locaux. Notamment Antoine (né en 251 à Fayoum) qui adopta un mode de vie cénobitique et vécut au désert jusqu’à plus de 100 ans. Il fut choisi comme patron de l’ordre hospitalier des Antonins parce qu’il avait résisté au feu des tentations. D’où, par raisonnement analogique, cet ordre prit en charge du XIIe au XVIIIe les égrotants estropiés qu’ils accueillent et soignent avec succès. Au XVe siècle, l’ordre compte dix mille religieux ; la base de leur traitement était la graisse de porc. L’ordre compta jusqu’à 41 commanderies générales et 400 hôpitaux.
La commanderie d’Issenheim acquit une richesse considérable. Elle commanda entre 1512 et 1516 aux artistes Nicolas de Hagenau et Grunewald un polyptique qui fut placé sur le maître-autel. Il fut transporté à Colmar en 1852 au couvent des Dominicains d’Unterlinden. Le retable est constitué de 8 panneaux en bois de tilleul qui se referment sur un retable sculpté. C’est un polyptique germanique à double volet. Le retable fermé montre une crucifixion en une seule scène. De part et d’autre, saint Sébastien et saint Antoine en gothique. La première ouverture (pour les grandes fêtes) donne à voir l’Annonciation, l’Incarnation et la Résurrection. La seconde ouverture est sculptée et peinte : au centre, saint Antoine et saint Jérôme.

Les malades étaient mis en présence du retable pour prier et buvaient du «vinage» (vin de saint Antoine en Dauphiné). On les nourrissait de pain de bonne qualité et de plantes.
Chimie : à partir du XXe siècle sont isolés les alcaloïdes responsables :
- L’ergotoxine responsable de la vasoconstriction
- L’ergotamine (gynergène) pour les hémorragies et les migraines
- La méthergine utéro-constrictrice
- Le delysid psychotique
Document complet disponible chez l’auteur : dorina.ghirardi@gmail.com
Présent texte rédigé par Franz Philippart

